Aristide Bruant (1851-1925)


Aristide Bruant Le célèbre chansonnier Aristide Bruant enregistra pour la maison Pathé, mais les disques originaux sont difficiles à trouver. Leur diffusion dut être assez restreinte, du fait de la marginalité de l'auteur et de son répertoire. Une excellente compilation est parue sur un double CD dont nous reproduisons le texte de présentation :

BIOGRAPHIE

Costume de velours noir à grosses côtes, écharpe rouge rejetée dans le dos et feutre à larges bords : la silhouette de Bruant - telle qu'elle fut immortalisée par le crayon de Toulouse-Lautrec - fait désormais partie de notre mémoire collective. Bien plus, à vrai dire que sa voix, qui nous est pourtant parvenue par le miracle des premiers enregistrements sur cylindres et des disques 90/100 tours, ancêtres des 78 tours.

Mais, au-delà de la seule silhouette, il y a toute une "mythologie Bruant", soigneusement cultivée par le chanteur lui-même, qui veilla toujours à peaufiner son image et sa légende, tout au long d'une carrière courant sur près d'un demi-siècle. Au point que - avec le temps - le véritable Aristide Bruant s'est progressivement effacé derrière le mythe, tirant ainsi un solide rideau de confusion entre la postérité et lui. Et, quitte à écorner un brin l'icône, il faut bien oser reconnaître que, quel qu'ait pu être son talent (au demeurant, immense !), une bonne part de la popularité du chantre des barrières de Paris repose sur un malentendu.

Monsieur Aristide Bruant, Chansonnier Montmartrois
Ainsi, sous prétexte qu'il chantait les apaches et les gigolettes, les souteneurs et les filles-mères, et parsemait ses refrains des noms des faubourgs les plus populaires, tout en insultant le bourgeois venu s'encanailler chez lui, nombreux sont ceux qui ne veulent voir en Bruant qu'une espèce de porte-parole du petit peuple de la rue. Une sorte de chroniqueur social, voire de moraliste plus ou moins anarchisant, alors qu'à de rares exceptions près il fit surtout oeuvre de caricaturiste.

Né en 1851, à Courtenay (Loiret), d'une famille d'honnête bourgeoisie, Aristide Louis Armand Bruand (il changera le d final pour un t), fréquente le collège jusqu'à l'âge de 17 ans, ce qui est assez exceptionnel pour l'époque et le démarque déjà du peuple des humbles qu'il se plaira à peindre. S'essayant d'abord au café-concert, en jouant la carte du dandysme (jaquette noire, pantalon "bois de rose", gilet à ramages, souliers vernis et chapeau tube), il ne trouve finalement son véritable style qu'après que Jules Jouy l'ait introduit au Chat Noir, le fameux cabaret de Rodolphe Salis. Dès lors le personnage ne variera plus, et lorsque Salis déménage vers des locaux plus vastes, Bruant, qui a envie de voler de ses propres ailes, récupère le lieu pour y créer Le Mirliton, dont il confie la décoration à ses amis Steinlen et Lautrec. Rapidement, Le Mirliton devient l'endroit à la mode où il est bon ton de venir finir sa soirée ; et parmi les bourgeois ravis de se faire houspiller par le maître de céans, se glisse parfois un Grand Duc russe ou le Prince de Galles en personne.

Créateur prolifique, doublé d'un excellent homme d'affaires, Bruant fait rapidement fortune ; au point d'acheter le Concert de l'Epoque (futur Pacra) et le château de Courtenay, son village natal, où il finit par se retirer pour mener l'existence prospère d'un hobereau conformiste, élevant son fils dans le culte de l'armée et de l'Eglise, ce qui ne laisse pas de surprendre de la part de l'auteur de "Biribi" et de tant de couplets farouchement anticléricaux. Retraite dont il ne sortira plus, à partir de 1917, que pour un récital unique, à l'Empire, quelques semaines avant sa mort, à Courtenay, le 11 février 1925.

Marc Robine




Dernière mise à jour 30 Mai 2000
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